Depuis Belvès le relief va se creuser, la forêt occuper la première partie de l’itinéraire, puis les points de vue se dégager peu à peu sur la vallée Dordogne que le chemin surplombe. Après les villages de Saint-Germain-de-Belvès et de Cladech situés sur les crêtes, la descente commence vers la vallée à travers des champs cultivés offrant un beau panorama sur la vallée. Un arrêt à la “Croix de la Mission” avant le village de Castelnaud permet d’embrasser d’un regard cette partie de la vallée où l’agriculture occupe encore une bonne place en bord de rivière sur les terres alluvionnaires sableuses, riches et fraiches.
étape 20km
Belves - Castelnaud-la-Chapelle
Saint-Germain-de-Belvès et cladech
Au départ de Belvès le chemin descend au pied de la colline vers le village de Fongauffier, dont le nom est mêlé à une très ancienne page de l’histoire d’Aquitaine.
Sur les hauteurs, le premier village rencontré est celui de Saint-Germain-de-Belvès. Bourg à caractère médiéval ayant été fortifié, ses venelles étroites et tortueuses appelées carreyroux débouchent sur une place rectangulaire entourée de maisons séculaires. Plus loin sur le chemin, la Chartreuse de Conty fut bâtie dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle et abrita en 1944 un maquis de Francs Tireurs Partisans Espagnols. Elle est embellie d’un jardin inspiré de l’Italie florentine.
Quelques kilomètres de sous-bois plus tard, c’est le village de Cladech qui se dévoile. Village typique du Périgord Noir avec ses constructions traditionnelles, le village aurait été fondé par une personne du nom de Jean de Cladech qui lui aurait laissé son nom. L’église romane dédiée à Radegonde apparaît dans un pouillé du XIIème siècle. Ne manquez pas dans le bourg avant de prendre la petite route qui descend, de vous retourner pour apercevoir les maisons flanquées de tours du XVIIème siècle qui donnent au village son aspect particulier!
Au hameau de “Merle”, près de Cladech, la géologie du sol laisse apparaître la présence de lignite, roche intermédiaire entre la tourbe et la houille. Une activité d’exploitation de ce gisement eut lieu, qui s’interrompit pour cause d’enclavement excessif ne permettant pas de transporter la lignite facilement.
Pourtant des travaux eurent lieu pour essayer de remplacer le charroi animal: projet d’ascenseur, projet de voie ferrée étroite entre Merle et Siorac…
Le travail dans les mines était pénible et mal rémunéré, mais il permettait à des paysans très pauvres de trouver un salaire. Malgré tout, les paysans restés à la terre craignaient les effondrements qui se produisaient parfois à la surface.
le château
des milandes
Encore une colline à gravir, puis un chemin de crête très agréable permet de descendre vers la Dordogne et le château des Milandes.
Ce château d’agrément, datant du XVème, fut construit par François Ier de Caumont, par amour pour sa femme, Claude de Cardaillac. Il faut avouer que la forteresse de Castelnaud, toute proche, était particulièrement rustique pour ne pas dire « spartiate »
Ce château offre, à cette époque, un début de confort et une douceur des lignes qui ne pouvaient que séduire la gent féminine : des fenêtres hautes et larges, des cheminées pour chauffer les nombreuses pièces, et un décor sculpté qui annoncent la Renaissance, autant de caractéristiques qui éloignent cette demeure des austères châteaux forts.
Du reste les deux styles, Gothique et Renaissance, cohabitent harmonieusement jusque sur le tablier de la cheminée du grand salon. Le château resta dans la famille des Caumont jusqu’à la Révolution.
Il n’eut pas à souffrir des choix cultuels de ses propriétaires successifs : très tôt, en effet les Caumont embrassèrent la religion réformée (l’église du château fut convertie en temple et l’un des Caumont, pourtant abbé de l’abbaye de Clairac, se convertit au protestantisme), mais ils surent, pour la plupart, manœuvrer habilement ; Jacques Nompar de Caumont, par exemple, sera maréchal et proche d’Henri IV.Après la Révolution, le château est vendu aux enchères.
Il se dégrade rapidement durant tout le XIXème siècle. En 1900 il est sauvé de la ruine par un industriel, Charles Claverie, qui entreprend une restauration sérieuse. Il complète le bâtiment par un chai et une ferme que Joséphine Baker, nouvelle propriétaire après 1945, affectionnera tout particulièrement.
Après le décès de la célèbre artiste de Music-hall, la demeure fut acquise par la propriétaire actuelle qui, avec passion, continue à l’entretenir. Le château est ouvert à la visite.
Le château de castelnaud
De la Renaissance, le chemin conduit à nouveau au Moyen Âge en se dirigeant vers le château de Castelnaud.
Avant d’arriver à celui-ci, une petite halte s’impose à la croix de la Mission: cette grande croix isolée dans le bois, bien loin de toute église, en surplomb de la rivière constitue un repère et le point de vue en a pris le nom.Généralement, ces croix de mission étaient implantées après une mission d’évangélisation des populations qui avaient un peu perdu de vue la religion, et elles sont gravées de la date de cette mission. Fernand de la Tombelle, compositeur de la fin du XIXème siècle et propriétaire du château de Fayrac tout proche fit ériger cette croix ici par reconnaissance après sa nomination de Commandeur de l’Ordre de Saint Grégoire.
Le point de vue sur la vallée est ici spectaculaire, se trouvant sur une falaise surplombant la rivière d’une hauteur de 200 m. On aperçoit sur la droite la confluence avec le Céou, en face le château et les jardins de Marqueyssac, et le long de la rivière les champs de maïs, colza, tabac, tournesol, soja, orge, tritical et légumes disposés perpendiculairement à la rivière pour des raisons de drainage.
Il faut maintenant redescendre vers la rivière en passant sous les remparts de l’imposant château médiéval de Castelnaud. Son histoire est complexe, faite de traîtrises et d’assauts furieux, à l’époque de la croisade albigeoise, d’une relative stabilité du XIIIème jusqu’au début de la guerre de Cent Ans où le château passe d’un camp à l’autre en fonction de l’opportunisme des chefs de guerre ; c’est ainsi qu’en 1405, le château est pris de force par les Anglais commandés par Archambaud d’Abzac qui le revend aussitôt aux Français pour 6000 écus d’or avant de le reprendre par surprise en 1407 ! Ce n’est qu’en 1442, après un siège de trois semaines, que le roi de France parvient à reprendre cette forteresse, moyennant la vie sauve pour la garnison et 400 écus.
Mais les Anglais sont définitivement chassés. Du XIIème siècle, sur le plan architectural, il ne reste rien. Du XIIIème siècle datent le donjon carré et la courtine formant éperon.
Tout le reste date principalement du XVème siècle. Brandelis de Caumont reconstruit le château à partir de 1443 ; son fils, François (celui que nous avons croisé aux Milandes), continue l’œuvre amorcée, en mettant le château au goût du jour : deux tours semi- circulaires dotées de canonnières sont érigées dans la basse-cour, ainsi qu’un vaste corps de logis à côté du donjon. La grosse tour d’artillerie sera construite en 1520.
Les Caumont étaient protestants et savaient s’entourer de personnages efficaces ; c’est ainsi qu’ils s’adjoignirent un capitaine talentueux mais aussi tristement célèbre pour sa cruauté : Geoffroy de Vivans fera, en effet, de Castelnaud son repère et sa base de repli.
On comprend aisément que le château n’ait pas eu à subir de dégradations durant les guerres de Religion. Il arriva intact à la Révolution où il fut abandonné pour servir de carrière de pierres. Dans la seconde moitié du XXème siècle, il fut acquis par un riche particulier qui restaura la vénérable forteresse pour l’ouvrir au public qui y découvre actuellement l’un des plus beaux musées d’histoire du Moyen Âge de France, avec une collection exceptionnelle d’armes d’époque
Les histoires d'Amadour
METTEZ VOS PAS DANS LA LEGENDE
Si vous avez chaud, n’hésitez pas à aller vous rafraîchir à la fontaine que l’on appelle font-Gauffier, qui se trouve en bas de Belvès. On disait au Moyen Age que c’est l’endroit où le dernier des rois d’Aquitaine, le jeune et vaillant Waifre (Gauffier en Occitan), était venu se reposer et se désaltérer. Waifre réussit à défendre son royaume d’Aquitaine pendant près de dix ans contre le roi des Francs, Pépin le bref qui voulait le conquérir. C’est par traitrise que le roi des Francs, pour qui Waifre n’était qu’un duc, le fit assassiner. Le dernier des rois d’Aquitaine, Waifre/Gauffier fut ensuite enterré dans un lieu secret, en Périgord.
Suivez bien le balisage, car si vous vous égarez vers le proche village de Doissat, vous pourriez tomber sur « la Golotte », une sorcière connue pour avoir le mauvais œil et jouer de mauvais tours aux passants… Même si on dit qu’elle est morte depuis longtemps, la méfiance reste de mise.
Savez-vous où les évêques qui accompagnaient Simon de Montfort lors de la croisade contre les Albigeois situaient l’ « arche », le trône de Satan sur terre ? Ici, en Périgord, le long de la vallée de la Dordogne, tellement le pays était « infesté » de Cathares. Un des chefs les plus connus des partisans des Cathares en Périgord, n’était autre que le seigneur du château de Castelnau, Bernard de Casnac. Avec sa femme Alix de Turenne, ils firent grande guerre aux Français et aux troupes de Simon de Montfort. Simon de Montfort vint plusieurs fois en Périgord pour tuer Casnac, mais il lui échappa à chaque fois.
L’histoire dit encore que lorsque Simon de Montfort assiégeait la ville de Toulouse pour la détruire et brûler sa population, celui qui amena et dirigea les renforts pour aider les Toulousains et briser le siège n’était autre que Bernard de Casnac, bien décidé à régler ses comptes avec Simon de Montfort. En l’apprenant, ce dernier manoeuvra pour aller à la rencontre de son ennemi, et il prit en pleine tête une pierre lancée par une catapulte tenue par des femmes, qui lui écrasa le crâne. Les Périgourdins et les Toulousains firent ensuite une grande boucherie des chevaliers français. Et, alors que le soir on festoyait dans Toulouse libérée, on dit qu’on chanta longtemps en Occitan les noms du Comte Raimon de Toulouse et de Bernard de Casnac le Périgourdin, les vainqueurs du méchant Simon.